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250 ANS DE TRAVAIL DE LA LAINE A PUSSAY
Dès 1613, les registres paroissiaux de Pussay indiquent que Jean Bourdeau est chaussetier. Comme ces registres démarrent en 1604, il est possible de penser qu’il l’était déjà auparavant et qu’il n’est peut-être pas le seul. Le curé ne mentionne sa profession que pour le distinguer de ses homonymes qui sont tailleur d’habits, laboureur ou tondeur. Il avait préalablement noté un tissier en toiles, Charles Fougu, en 1609. En 1639, Sébastian Pommereau est également chaussetier.
Dans les années 1680, les mentions des métiers de la laine sont encore plus fréquentes. Louis Gaultier et Pierre Bourdeau sont peigneurs de laine, alors que Charles Lebeil est dit marchand de bas en 1687 et que son fils Charles est peigneur de laine en 1698. Quant à François Bourdeau, il est bonnetier en 1705.
En 1740, le cadastre de l’élection de Dourdan cite : « quelques bonnetiers occupent les habitants à filer, carder et apprêter la laine ».
1745-1748 – Fabrication de bas tricotés à la main par des ouvriers spécialisés dans des locaux appropriés.
Dans sa monographie sur la commune de Pussay datée de 1899, l’instituteur, Ernest Maisse, écrit : « La fabrication des bas tricotés à la main, y fut implantée vers 1745 et s’étendit à tous les villages voisins, le travail se faisait dans chaque famille et surtout pendant l’hiver. La marchandise ouvrée était ensuite achetée par les bonnetiers de Pussay qui l’expédiaient ensuite par messagerie dans toutes les parties du territoire français. Dès 1748 la fabrication se fait par des ouvriers spéciaux travaillant en commun dans des locaux appropriés ».
1766 – Première manufacture importante fondée par Pierre Paul Dujoncquoy
Ernest Maisse continue ainsi : « Mais c’est en 1766 qu’une manufacture importante fut fondée par un sieur Pierre Paul Dujoncquoy, elle exista jusqu’en 1881 époque à laquelle elle fut transférée à Sainte-Mesme près de Dourdan ».
Il n’est pas interdit de penser que si Pussay a vu se développer plus que partout ailleurs cette industrie de la laine, elle le doit à l’existence conjointe sur son territoire d’une abondante main d’œuvre et de la matière première. D’une part, des fermes importantes s’étaient créées, nécessitant de nombreux bras partiellement inoccupés l’hiver surtout parmi la population féminine. D’autre part, la culture des céréales avait entraîné la présence d’importants troupeaux de moutons et ce, malgré un lourd handicap : l’absence d’eau courante. Cette dernière ne manquait cependant pas dans le sous-sol.
1788 – La vie quotidienne à Pussay avant la Révolution
Toujours d’après Ernest Maisse, « en 1789 plusieurs fabriques existaient et occupaient plusieurs centaines d’ouvriers ».
Mais à cette époque-là, c’est François Boncerf, médecin consultant et conseiller ordinaire du roi pour le bailliage de la ville d’Etampes, qui nous dépeint le mieux la vie, les occupations et l’environnement des habitants de Pussay en 1788 :
« Généralement parlant les villages de Pussay, Gommerville, Intréville, Baudreville, Oysonville, Chatenay et tous les autres villages de cet arrondissement de la Beauce, où l’on fait un commerce considérable de bas de laine, ont plus fréquemment des malades que ceux où l’on cultive seulement les terres. Il est probable qu’une partie des laines qu’ils achètent pour fabriquer proviennent de moutons attaqués d’épizootie, inconvénient qui peut contribuer à altérer la santé ; de plus les atteliers trop petits, où les ouvriers foulent, apprêtent et teignent les bas, ne contribuent pas moins au dérangement de leur santé. La principale raison, selon moi, qui y produit la base d’un air malfaisant, est parce qu’on n’éloigne pas les eaux de savon qui ont servi à préparer les bas et les laines qui sont encore imprégnés de suint et de savon noir ou huile rance ; ces eaux séjournent dans les rues des villages ou dans les cours de ces manufactures, s’y corrompent et vicient l’air, qui, à son tour, trouble les digestions et infecte le chyle : ce désordre est nécessairement suivi de différentes maladies. Les ouvriers qui apprêtent les bas sont presque continuellement exposés à la fumée de vapeurs tièdes, soit des eaux de savon, soit de teintures ; d’où il résulte que quelques uns sont attaqués de boufissure ou d’hydropisie ; comme cette maladie n’est qu’accidentelle, elle est moins opiniâtre ; l’usage des toniques et des apéritifs réussit chez ceux qui sont encore jeunes. Il est heureux pour ces ouvriers qu’ils cessent leur travail dans les chaleurs de l’été, et qu’ils changent d’occupation à l’air libre. Ils font la moisson, soit pour eux, soit pour leurs marchands, fabricans, qui sont en même tems laboureurs. Le grand air, joint à une meilleure nourriture renouvelle la crase des humeurs, et les met en état de subir un nouveau choc.
Le village de Pussay, quoique situé dans une plaine est plus sujet aux inconvénients ci-dessus, parce qu’il s’y fait un plus grand commerce de bas de laine que dans toutes les autres ; C’est un des villages de la Beauce où j’ai été appelé le plus fréquemment pendant trente ans…
Les belles femmes y sont rares : celles de la classe du peuple s’occupent la moitié de l’année à tricotter des bas ; dans l’hyver elles se rassemblent dans des caves ou dans des écuries, pour se faire compagnie, et pour épargner du bois en tricotant ».
1796 – Fondation de la fabrique Boyard
1807 – Fabrique de bas, mitaines et chaussons de laine établies dans le canton de Méréville
L’annuaire de Seine-et-Oise indique : « Les fabricants sont au nombre de 28 disséminés dans plusieurs communes de ce canton, parmi lesquelles on distingue la commune de Pussay qui compte jusqu’à 15 fabricants et occupe 1400 à 1500 personnes, hommes, femmes et enfants. Ils emploient, année commune, 100.000 kg de laine de toute espèce tant du Berry que de la Romanie et de la Pouille en Italie.
Avec ces laines, on fabrique des bas, des chaussons, des gants et des mitaines pour tous les âges ; les marchandises s’expédient pour Rouen, Dieppe, Bolbecq, Paris, Amiens, Beauvais, Melun, Orléans, Blois, Tours, Saumur, Nantes et autres lieux. Le produit commun de ces marchandises est de 6.000 francs.
Le nombre d’ouvriers employés à cette fabrication s’élève à 2338 ; il est composé de vieillards, d’hommes faits, et d’enfants, employés chacun selon sa force et ses moyens ».
1810 – Début des enquêtes de statistiques industrielles
Elles ont été faites car « Sa Majesté désirait avoir tous les ans sous les yeux, le tableau général de la situation des manufactures de l’Empire ». (Archives Départementales des Yvelines, série 15M)
1810-1811 – « On a réuni dans cet état les renseignements de l’année 1810, attendu que les objets fabriqués n’étant que pour l’hiver, la totalité des ventes et achat n’a lieu qu’à la fin de chaque année et non journellement comme dans les fabriques de toute autre espèce. On ne peut par conséquent rien dire encore sur le travail de 1811. Enfin, on n’a point donné le détail des objets fabriqués parce qu’ils ne s’établissent qu’en raison du placement et ne restent jamais en magasin ».
Nombre d’ouvriers employés à carder à la main : 96 ; à la filature à la main : 192 ; au tricot à l’aiguille : 960 ; à fouler : 33 ; comme apprêteur : 78
Quantité de laine filée et employée : 60160 kg
Estimation du prix des laines employées l’une dans l’autre : 4 F le kg
Montant en argent : 240 640 F ; Frais de fabrication : 96 256 F ; Montant total : 336 896 F
30 septembre 1812 – Bonneterie de laine à Pussay (15M3)
propriétaire : Dujoncquoy (Vve), 400 ouvriers
Epoque de leur établissement : immémoriale
La fabrique a augmenté depuis 10 ans.
19 octobre 1812 – Bonneterie de laine à Pussay (15M3)
Nombre d’établissement : 15
Nombre d’ouvriers travaillant pour les établissements : 1020
Prix moyen des journées qui leur sont payées : de 35 centimes à 1,25 fr
Observations : tous les ouvriers ne travaillent que pendant 9 mois de l’année et dans leur nombre s’en trouvent 864 qui sont disséminés dans des communes voisines. Il s’emploie annuellement 50000 kg de laines de trois qualités et parties au prix de 3fr20c, 4fr50C et 6fr le kg. Toutes ces laines sont indigènes.
Troisième trimestre 1812 – Etat par aperçu des fabriques de bas, gants, & chaussons de laines tricotées qui ont été fabriquées en la commune de Pussay (15M7)
« Nombre d’ouvriers travaillant pour l’établissement 156
Prix moyen des journées qui leur sont payées 1 fr 25
Nombre des filleurs et tricoteuses 864
Prix moyen des journées qui leur sont payées 0 fr 25
Valeur brute des produits 42112 francs
Laine fine 1ère qualité est de Berry à 6 fr le kilogramme
Laine commune 2ème qualité est de 4 fr le kilogramme
Observations les ouvriers sont disséminés dans la campagne ils ont été occupés aux travaux des champs pendant deux mois qui a été les mois de juillet & août, nous avons cru qu’il était inutile de les comprendre dans ce trimestre.
Les matières premières sont indigènes servant à la fabrication.
Fait et arrêté par nous Maire exact le présent relevé à Pussay le six novembre mil huit cent douze Chaudé »
1813-1819 – Statistiques industrielles (15M4 – 15M5)
1813 – Tableau du nombre d’ouvriers employés chaque trimestre (janvier, avril, juillet, octobre)
à carder à la main : 96 ; 80 ; 80 ; 96
à la filature à la main : 160 ; 140 ; 140 ; 160
au tricot à l’aiguille : 800 ; 650 ; 650 ; 800
à fouler : 28 ; 20 ; 20 ; 28
comme apprêteur : 65 ; 72 ; 60 ; 65
Quantité de laine filée et employée (idem) : 15040 kg ; 12000 kg ; 7520 kg ; 15040 kg
Observations en avril – « J’observe que ce trimestre se trouve dans les travaux de la campagne. Il est employé moins de laine que dans les autres et partant il se trouve moins d’ouvriers puisque c’est la saison de proposer la marchandise à la vente ».
1814 – Tableau du nombre d’ouvriers employés chaque trimestre (janvier, avril, juillet, octobre)
à carder à la main : 80 ; 50 ; 30 ; 96
à la filature à la main : 140 ; 90 ; 50 ; 160
au tricot à l’aiguille : 650 ; 500 ; 400 ; 800
à fouler : 23 ; 20 ; 12 ; 28
comme apprêteur : 56 ; 50 ; 36 ; 67
Quantité de laine filée et employée (idem) : 11850 kg ; 6250 kg ; 2000 kg ; 15040 kg
Observations en avril – « Ce trimestre a été interrompu par l’effet des circonstances et l’occupation du pays par les troupes alliées » et en juillet – « Ce trimestre est à peu près nul, d’abord effet des circonstances et par la moisson ».
1815 – Tableau du nombre d’ouvriers employés chaque trimestre (janvier, avril, juillet, octobre)
à carder à la main : 110 ; 55 ; 40 ; 98
à la filature à la main : 190 ; 100 ; 90 ; 170
au tricot à l’aiguille : 900 ; 500 ; 350 ; 850
à fouler : 29 ; 20 ; 15 ; 28
comme apprêteur : 60 ; 60 ; 50 ; 65
Quantité de laine filée et employée (idem) : 16000 kg ; 5400 kg ; 1800 kg ; 16025 kg
Observations en avril : « Les fabriques ont été interrompues pendant ce trimestre par les événements » et en juillet : « Ce trimestre a été presque nul, par le séjour des troupes alliées et par les travaux de la moisson ».
1816 – Tableau du nombre d’ouvriers employés chaque trimestre (janvier, avril, juillet)
à carder à la main : 95 ; 70 ; –
à la filature à la main : 160 ; 140 ; 60
au tricot à l’aiguille : 950 ; 800, 720
à fouler : 32 ; 27 ; 28
comme apprêteur : 60 ; 70 ; 75
Quantité de laine filée et employée : à la main (en kg) : 15000 ; 10500 ; 25000
à la filature mécanique (en kg) : 4000 ; 1000 ; 600
Observations pour janvier – « M le maire de Pussay observe que sur la quantité de laine employée pendant ce trimestre, il en a été filée 4000 kg pour les filatures d’Orléans et de Saint-Lubin près Nonancourt ».
1817 – Tableau du nombre d’ouvriers employés chaque trimestre (janvier, avril, juillet, octobre)
à carder à la main : – ; – ; 50 ; 70
à la filature à la main : 80 ; 60 ; 110 ; 135
au tricot à l’aiguille : 850 ; 720 ; 750 ; 850
à fouler : 29 ; 28 ; 28 ; 28
comme apprêteur : 78 ; 75 ; 72 ; 70
Quantité de laine filée et employée : à la main (en kg) : 30000 ; 25000 ; 6000 ; 12000
à la filature mécanique (en kg) : 3000 ; 600 ; 2500 ; 6500
Observations en juillet : « Ce trimestre est peu important rapport aux travaux de la moisson ».
1818 – Tableau du nombre d’ouvriers employés chaque trimestre (janvier, juillet, octobre)
à carder à la main : 70 ; 48 ; 66
à la filature à la main : 130 ; 100 ; 130
au tricot à l’aiguille : 950 ; 725 ; 950
à fouler : 29 ; 26 ; 28
comme apprêteur : 65 ; 68 ; 66
Quantité de laine filée et employée : à la main (en kg) : 13500 ; 4000 ; 9500
à la filature mécanique (en kg) : 5500 ; 2500 ; 9000
Observations en avril : « Ce trimestre est peu important, rapport aux travaux de la moisson ».
1819 – Tableau du nombre d’ouvriers employés chaque trimestre (janvier, avril, juillet, octobre)
à carder à la main : 68 ; 50 ; 30 ; 50
à la filature à la main : 135 ; 115 ; 65 ; 100
au tricot à l’aiguille : 960 ; 850 ; 700 ; 900
à fouler : 28 ; 24 ; 20 ; 25
comme apprêteur : 66 ; 70 ; 55 ; 60
Quantité de laine filée et employée : à la main (en kg) : 10000 ; 10000 ; 3000 ; 7000
à la filature mécanique (en kg) : 9000 ; 5000 ; 2500 ; 8500
Observations en juillet – « Ce trimestre est peu important, rapport à la moisson et aux affaires qui sont en stagnation ».
1827 – Etat de situation de la fabrique de bas chaussons gants et rentures ou chaussettes de laine tricotés de la commune de Pussay (15M7)
Quantité de laine employée par année : 65,000 kg
Nombre d’ouvriers employés : fouleurs 40, apprêteurs 70, enformeurs 15, teinturiers 6, tricoteuses 1200
Prix des laines qui s’emploient aux diverses fabriques : de 2fr50 à 7fr par kg
Valeur commerciale : le prix des marchandises varie suivant les quantités
Observations : le tricot se fait à la main et presque tout sur le département d’Eure et Loir
Le présent état dressé par nous, maire de Pussay, le 10 janvier 1827, Delanoue.
1827 – Etat de situation des filatures par manège des communes de Pussay & Angerville
Nom des lieux des établissements : Pussay ; Angerville
Noms des maîtres des établissements : Dujoncquoy Alexandre ; Mathieux
Quantité de laine employée au filage : 15,000 kg ; 15,000 kg
Nombre d’ouvriers employés : 25 ; 24
Nombre des métiers : 2 ? mis en mouvement par un manège horizontal occupant cinq mulets ; 1 ? mis en mouvement par un manège à tirage occupant trois chevaux
Le présent état dressé par nous, maire de Pussay, le 10 janvier 1827, Delanoue.
1832 – Rapport sur la situation industrielle de l’arrondissement d’Etampes le 5 octobre (15M5)
Les usines de la vallée d’Etampes se sont ressenties de la crise qui a eu lieu il y a deux ans. La population de Paris ayant tout à coup diminué dans une très forte proportion, la consommation et par suite la demande de farine ont nécessairement subi la même diminution. Aujourd’hui même encore, les envois sur Paris sont loin d’avoir atteint leur ancienne activité…
Le commerce de laine a beaucoup souffert à la suite des événements de juillet 1830. Une baisse considérable et subite eut lieu à cette époque dans les prix et les négociants qui venaient de faire des achats considérables à des prix fort élevés éprouvèrent de grandes pertes. Depuis cette époque, cette branche de commerce s’est un peu relevée et cette année particulièrement, elle a repris une assez grande activité. Une augmentation de 20 % sur la laine brute et de 10 % sur la laine lavée s’est fait sentir sur les prix de l’année dernière.
1834 – Enquête par commune (15M6)
Cette statistique, dont le préfet Aubernon veut faire hommage au département, est demandée au maire de Pussay le 20 août.
Aperçu approximatif des produits des fabriques de bas de laine, de flanelle, etc. : 660 000 F (produit de 19 fabricants dont j’ai cru pouvoir me dispenser d’indiquer les noms et le produit de chacun).
Nombre d’ouvriers qu’elles emploient : 150
Indication des principaux marchés de leurs produits : Paris et les provinces : Brie, Normandie, Picardie.
Observations : bas et chaussons drapés
1835-1839 – Rapports du Sous-Préfet de l’arrondissement d’Etampes au Préfet de Seine-et-Oise (15M8)
Janvier 1835 – 19 fabriques de bas de laine à Pussay
2ème semestre 1835-1er semestre 1836 – Les fabriques de Pussay ont pris depuis quelques temps un grand développement et occupent un nombre considérable d’ouvriers. Sa position avantageuse au milieu de la Beauce et les communications récemment établies avec les vallées de Boissy-la-Rivière, Ormoy et Saclas où sont situés les établissements de filature, lui assurent un long avenir de prospérité.
Le commerce des laines est aussi dans un état satisfaisant, quoique le prix assez élevé auquel les cultivateurs ont soutenu leurs produits n’ait peut-être pas permis aux laveurs et marchands de laine de réaliser cette année d’aussi grands bénéfices qu’à l’ordinaire.
2ème semestre 1837 – Le commerce est dans un état satisfaisant à Boissy, Pussay, Angerville, Auvers et Méréville. Les ouvriers sont presque tous occupés et leur salaire n’a subi aucune variation.
1er semestre 1838 – Lavage de laines : il n’y a plus que 15 lavoirs à Etampes au lieu de 18. Ils occupent 200 ouvriers et les laines sont employées à la fabrication de drap.
Le lavage de laine est en souffrance actuellement. On attribue ce ralentissement dans les affaires aux demandes que font directement les manufacturiers aux cultivateurs. Ces industriels préfèrent, à ce qu’il paraît, acquérir les laines en suint et les faire laver eux-mêmes. Car, bien que les laines soient déjà préparées par les laveurs lorsqu’ils les livrent aux fabriques, cette préparation ne dispense pas les fabricants de procéder à un second lavage. Jusqu’ici la confiance qui s’est établie depuis longtemps entre les cultivateurs et les laveurs de laine a paralysé la concurrence des manufacturiers, mais il est impossible de prévoir si cette confiance se maintiendra longtemps. Le salaire des ouvriers est toujours le même. Un grand nombre d’entre eux sont maintenant occupés aux travaux de la moisson.
1er semestre 1839 – Le commerce des laines se maintient, mais ne se développe pas, en raison des événements des 12 et 13 mai. Ces agitations troublent la tranquillité, ôtent la confiance et paralysent le commerce et l’industrie.
2ème semestre 1839 – Le commerce des laines a perdu de son activité, les fermiers qui n’ont pas vendu trouvent aujourd’hui des offres inférieures de 25 à 30 % aux prix de la tonte. Les manufacturiers ne font aucune demande et la plupart d’entre eux se livrent maintenant au lavage des laines, opération essentiellement nuisible aux débouchés des laines lavées à Etampes, aussi en reste-t-il une grande quantité en magasins.
Dans les communes rurales où existent des établissements un peu importants, tels qu’à Lardy, Pussay, Boissy, Itteville, et qui se maintiennent dans un bon état de prospérité, les ouvriers sont presque tous toujours occupés et ceux qui ne le sont pas sont employés à la culture.
Le prix élevé du pain, les établissements industriels fermés et la saison rigoureuse conduisent la municipalité d’Etampes à instituer des ateliers de charité, chargés de l’entretien des chemins vicinaux.
1840 – Essor des manufactures
Selon l’instituteur Ernest Maisse « on comptait en 1840, 20 fabriques de bas qui employaient tant à Pussay qu’aux environs 4000 ouvriers produisant pour près de 2 millions de marchandises. Sous la 2ème République, la production progressa encore, puisque le nombre des fabricants atteignait 25 ».
1840-1841 – Statistique de France (15M2)
Fabriques ou manufactures de bonneterie – Pussay – 18 fabriques séparées dont aucune n’occupe 20 ouvriers réunis en atelier :
MM Forteau et Gry ont 50 ouvriers dans la commune
Dujoncquoy et Fils, 40 ouvriers
Boyard Fils, 40 ouvriers
Buret Denizet, 20 ouvriers,
les autres sont en-dessous et plusieurs n’en ont qu’un seul qui travaille avec eux. Toutes les filatures ne sont pas dans la commune, les fabricants réunis occupent presque toutes les femmes de la classe ouvrière de 3 arrondissements environ, les teintures ne se font pas non plus dans la commune.
Matières premières employées :
Nature : laines métis françaises et étrangères
Quantité : 110 000 kg
Valeur : de 2 à 9 F le kg, le terme moyen 4 F le kg
Valeur totale : 440 000 F
Lieux d’origine : françaises, 1/8 étrangères
Produits fabriqués :
Nature : chaussons tricotés, bas tricotés, bas au métier
Quantité : 110 000 douzaines de bas et chaussons
Valeur : à 10 F la douzaine terme moyen
Valeur totale : un million cent milles francs
Débouchés ou lieux de destination : la France, dans la partie nord principalement
Ouvriers : 230 environ, hommes 200, femmes 10, enfants 20
Salaire journalier en franc et centimes : homme : 1,75 ; femme : 0,75 ; enfant : 0,60
Moteur : 1 moulin à manège, 6 chevaux
Machines : 36 métiers
1840-1850 – Rapports du Sous-Préfet de l’arrondissement d’Etampes au Préfet de Seine-et-Oise (15M8)
2ème semestre 1840 – On compte près d’une trentaine de fabriques de bas et chaussons de laine drapée dans l’arrondissement. C’est à Pussay principalement que cette industrie est très florissante. On compte 20 établissements distincts dans cette commune seule, établissements qui occupent un grand nombre d’ouvriers et font annuellement au dehors des affaires importantes.
On n’a qu’à féliciter tous les établissements de Pussay qui prospèrent et introduisent peu à peu les métiers, pour remplacer par des travaux prompts et plus économiques, une grande partie de leurs produits tricotés. A mesure que leurs relations s’étendent, ils augmentent leurs perfectionnements ; presque toutes les formes de bas sont changées. Elles sont faites sur la forme des jambes et pieds et s’ajustent sans bourrelet ou dureté qui blessaient ceux qui s’en servaient. Aux couleurs noires qui dominaient pour les bas et les chaussons fourrés, on commence à substituer du gris. Il y a donc progrès réel.
2ème semestre 1841 – Comme les laveurs ne sont qu’intermédiaires entre les cultivateurs et les fabricants, ils éprouvent continuellement des déboires, parce qu’il est évident aujourd’hui que les fabricants trouvent un réel avantage à employer la laine allemande et ne veulent accepter la laine française qu’à des conditions souvent inférieures au prix d’acquisition avant le lavage. Dans cette baisse exagérée, les laveurs de laine ne font pas seuls des pertes énormes. Les cultivateurs sont obligés de subir des réductions telles que jamais leurs plaintes n’ont été si vives.
L’agriculture s’en ressent déjà car beaucoup par mesure d’économie, ont réduit le chiffre de leurs moutons. Le gouvernement seul peut remédier à cet inconvénient, en rétablissant le droit d’entrée des laines étrangères à 33 % ad valorem comme il existait par suite de la loi de 1826. La réduction à 22 % fixée par la loi de 1834 est réellement un coup de massue donné à l’agriculture française que le gouvernement ne saurait trop encourager, car elle est la force vitale du pays. En venant en aide à l’agriculture, qui en ce moment appauvrit le sol par la réduction des engrais, le gouvernement soulagerait en même temps l’industrie des laines, qui avait aussi une réelle importance ; industrie qui sans une main secourable est à jamais perdue.
Les 20 fabriques de bas de laine de Pussay sont toujours dans un état florissant. Comme les bras sont trop chers, cette industrie cherche au moyen de machines nouvelles à en diminuer le nombre et les tentatives jusqu’alors ont été heureuses. A Etréchy et à Etampes, il y a aussi 2 ou 3 fabriques, mais elles sont un peu en arrière comparativement à leur rivale de Pussay.
Les laines qui sont travaillées dans ces diverses fabriques ont été presque toutes filées à Boissy-la-Rivière, Saclas et Méréville. Les travaux des deux filatures de Saclas et Boissy-la-Rivière ont plus que doublé depuis cinq ans et cependant, presque tous leurs produits ne sortent pas de l’arrondissement. Il y a même un traité entre plusieurs fabriques de bas de Pussay qui demandent telles ou telles grosseurs de fils.
1er semestre 1842 – La situation de l’industrie du lavage est toujours en souffrance. Plusieurs laveurs ont pris le parti d’abandonner les affaires. Les 12 lavoirs existants encore sont, même à présent, peu actifs ; car les laveurs qui persistent dans ce commerce ne font pas de brillantes affaires. Les laines de la Beauce sont toujours à vil prix. Le nombre d’ouvriers ordinairement employés se montaient à 200 environ les années passées, il est maintenant considérablement réduit.
Il y a des fabriques de bas de laine à Etampes, à Etréchy et Pussay ; on en compte une vingtaine dans cette dernière commune.
A Pussay, il s’est formé une nouvelle fabrique de bas de laine qui n’a pas d’importance. Les prix de vente sont à peu près les mêmes que ceux de l’année précédente et ont cependant une tendance à la baisse, parce que les marchandises sont restées en magasins. Les métiers à bras introduits depuis deux ans ont de la peine à prendre. Les prix de façon étant bien plus élevés que dans les autres fabriques.
L’importance des travaux de terrassement et de maçonnerie qui s’exécutent en ce moment à Etampes et dans les environs pour la construction du chemin de fer, ont amené dans les localités un grand nombre d’ouvriers venant en partie des communes de l’arrondissement. A Etampes même, les ouvriers laveurs et autres ont quitté leurs ateliers pour travailler au chemin de fer ; il en est de même à Pussay, Boissy-la-Rivière, etc. où existent des filatures. Mais cette émigration n’a produit aucune influence fâcheuse, parce qu’en général, ces établissements sont moins pressés d’ouvrages que par le passé.
2ème semestre 1842 – La nouvelle fabrique qui a été établie à Pussay n’est pas en faveur quant à présent.
1er semestre 1843 – La situation de l’industrie du lavage des laines est un peu plus en souffrance qu’en 1842. Les laveurs qui se sont vus obligés de cesser leur commerce n’ont pas tous été remplacés. Les lavoirs existants sont en activité, mais on ne peut rien préjuger quant à présent du résultat de la saison.
Les suints seront vendus promptement à raison de 1F80 à 2 F le kilo. Les laveurs attendant maintenant avec anxiété, les demandes des fabricants, il paraît qu’ils sont encombrés de marchandises. Les ouvriers en laine qui étaient employés aux travaux du chemin de fer sont rentrés dans leurs ateliers et on en compte environ 200 occupés au lavage.
A Etampes, la surabondance des laines étrangères nuit à l’écoulement des laines du pays, parce qu’on peut les livrer à meilleur marché, ainsi que nous l’avons dit ci-dessus. Les laveurs attendent les commandes des fabricants.
A Pussay, le prix des marchandises a diminué par le fait de la concurrence et cependant, le prix des matières premières n’a pas baissé. Les fabricants travaillent sans bénéfice. Les métiers à bras introduits depuis trois ans ont toujours de la peine à prendre, parce que les prix de façon sont plus élevés que dans les autres fabriques. Presque tous les ouvriers sont occupés, les uns dans les diverses usines et les autres aux travaux agricoles, leur salaire est toujours le même.
2ème semestre 1843 – La prospérité des fabriques de bas de Pussay s’est un peu ralentie, parce que les prix sont trop bas, par l’effet de la concurrence. La douceur de la température a mis obstacle à l’écoulement des produits. Beaucoup d’ouvriers sont sans occupation. Le salaire de ceux qui travaillent a un peu diminué.
2ème semestre 1844 – A Pussay, deux associés d’une maison importante se sont divisés et ont formé chacun un établissement séparé. Les commandes de produits ont été bonnes cet hiver ; il n’est pas resté de produits invendus. Les ouvriers sont communs, leur salaire a une tendance à la baisse à cause de la mauvaise saison qui a commencé en décembre et finira en mars. Les matières premières ont un peu augmenté ; cette circonstance a amené un peu de ralentissement dans la fabrication.
L’industrie du lavage des laines est dans une meilleure situation. Le nombre des mêmes industriels ayant diminué depuis quelque temps, les fermiers vendent leurs toisons moins avantageusement puisque la concurrence est moins grande aussi on peut affirmer que les laveurs qui ont continué à se livrer à ce genre d’industrie le font cette année avec quelques profits et que leurs établissements sont dans un état de prospérité plus satisfaisant qu’en 1842 et 1843.
2ème semestre 1845 – Le lavage des laines est arrêté par suite de la mauvaise saison ; les laveurs font de la mégisserie pour ne pas rester inactifs ; ils occupent beaucoup moins d’ouvriers que dans la saison active.
Il existe une vingtaine de fabriques de bas de laine à Pussay et presque toutes sont occupées. Il existe en outre trois filatures de laine à Méréville, Saclas et Boissy-la-Rivière qui continuent à être dans un état prospère. Les filatures de laine sont toutes en pleine activité à Pussay, les fabriques de bas sont en souffrance parce que jusqu’à ce jour la température n’a pas été rigoureuse.
1850 – La fabrication de bonneterie qui compte dans la commune de Pussay un grand nombre d’établissements offre des résultats très satisfaisants. Elle ne présentera pendant les mois d’hiver que le chômage habituel, nécessité par la nature même des travaux. L’ouverture de travaux communaux pendant la saison rigoureuse, apporterait une grande amélioration dans le sort des ouvriers. Il est à regretter que la commune de Pussay soit dépourvue de toute ressource.
Enquêtes sur le travail des enfants (16M20 à24)
Une autre source nous donne des renseignements précieux : l’enquête demandée le 31 juillet 1837 par le ministère du commerce et des travaux publics sur « les conditions actuelles des enfans occupés dans les fabriques, la durée du travail auxquels ils sont soumis et les règles nouvelles qu’il serait utile de leur appliquer dans l’intérêt de l’humanité, comme dans celui du commerce ».
Dans le cadre de cette enquête, nous apprenons qu’en 1842, il y a 20 à 25 fabriques exploitées à Pussay sur lesquelles 3 occupent plus de 20 ouvriers :
Boyard
Forteau et Gry
Dujoncquoy Fils
(seules, les fabriques employant plus de 20 ouvriers sont soumises à la surveillance et le nombre d’ouvriers ne tient compte que de ceux travaillant à temps plein à la fabrique, non de ceux travaillant à l’extérieur)
De 1843 à 1849, les inspections se poursuivent, mais les rapports établis ne mentionnent plus les fabriques de Pussay. N’employaient-elles plus un nombre d’ouvriers supérieur à 20 ? N’employaient-elles plus d’enfants ? Ou les inspections sur Pussay se relâchaient-elles ? Il est impossible de répondre. Cependant, une lettre du Sous-préfet d’Etampes au Préfet de Versailles datée du 13 septembre 1859 fait allusion aux nombreux ateliers de Pussay et au manque de réponse à ses demandes d’inspection : « … Je n’ai reçu jusqu’ici que deux réponses aux lettres que j’ai adressées aux membres de la commission … dans mon arrondissement où les enfants sont occupés en petit nombre à l’industrie, et encore comme à Pussay non pas dans des ateliers nombreux, mais à la tâche dans leur famille … ».
1856 – L’annuaire de Seine-et-Oise mentionne 13 fabriques de bonneterie drapée :
Dujoncquoy et Fils ; Veuve Boyard ; Denizet ; Mme Gry ; Ballot-Delanoue ; Buret Fils ; Belzacq-Langlois ; Langlois Fils ; Lemaire Fils ; Langlois jeune ; Guyot ; Buret-Belzacq ; Lemaire Frères.
1860 – Enquête répondant aux exigences de la circulaire du Préfet en date du 5 mai (15M9)
1er trimestre 1859 – Pussay : fabrique de bonneterie, 18 établissements, 455 ouvriers. Le nombre des établissements n’a pas varié depuis le dernier trimestre. Les filatures de Guillerval, Pussay et Saclas comptent quelques ouvriers en moins. On attribue cette diminution à la faillite Varnier Royer d’Orléans. L’état de la fabrication et de la vente est médiocre. Les matières premières sont toujours très chères, les produits se vendent en conséquence. Les ouvriers ne se plaignent point. Tous sont satisfaits de leur salaire.
2ème trimestre 1859 – 18 établissements, 450 ouvriers, état de la fabrication et de la vente : bon. On attribue la diminution de plus de la moitié des ouvriers à la rentrée prochaine des récoltes. La vente des produits fabriqués se fait à un plus haut prix que sur le trimestre dernier. Cette hausse est toujours due au manque des matières premières.
3ème trimestre 1859 – 18 établissements, 472 ouvriers, satisfaisant. Les causes d’augmentation sont attribuées à des commandes plus considérables que dans le trimestre dernier. Il résulte de là que la guerre d’Italie n’a pas ralenti le commerce.
La proximité de Paris et la facilité des communications avec ce pays ne peuvent que donner de l’extension aux fabriques et autres établissements industriels. Les ouvriers gagnent à cet état de choses mais les vivres, notamment le vin et la viande étant à des prix trop élevés, il en résulte qu’ils ne peuvent guère faire d’économies.
1er trimestre 1860 – 18 établissements, 472 ouvriers, satisfaisant. L’augmentation est due à plus de commandes que dans les trimestres précédents. Le traité de commerce intervenu entre la France et l’Angleterre apportera une grande amélioration dans les fabriques.
2ème trimestre 1860 – 46 établissements de meunerie, filatures, fabriques de bonneterie et de couvre-pieds, 709 ouvriers, satisfaisant. L’augmentation du nombre d’ouvriers est due à une révision de la situation industrielle dans le canton. Il y a toutefois réduction dans le personnel des fabriques, causée par la baisse des marchandises par suite du traité de commerce avec l’Angleterre.
La fabrication se ralentira pendant les mois de juillet et août, la plupart des ouvriers s’adonnant aux travaux de la moisson.
3ème trimestre 1860 – 46 établissements, 843 ouvriers, bon. Les causes d’augmentation dans le nombre d’ouvriers proviennent de ce que des ouvriers qui quittent les filatures ou fabriques au moment de la moisson, y sont rentrés.
4ème trimestre 1860 – 46 établissements, 860 ouvriers, bon. En comparant le dernier trimestre avec celui qui nous occupe, on remarque que les ouvriers occupés sont plus nombreux de 17. Cette augmentation est annuelle et provient de ce que certains ouvriers sont occupés aux travaux de la moisson du mois de juin au mois de septembre, le pays étant plus agricole que manufacturier.
1860 – début d’utilisation de la vapeur
Selon l’instituteur de Pussay, Ernest Maisse, « en 1860, on commença à employer dans les usines la vapeur comme force motrice ; la fabrication subit alors des modifications radicales, le travail devint moins pénible pour l’ouvrier et la matière première, attaquée par les machines se transforma plus rapidement. Le tricot à la main fit bientôt place au feutre qui s’obtenait en foulant la laine avec le foulon à bras puis à vapeur. A la même époque, on pensa à garnir les chaussons d’une semelle de cuir cousue à la main, ce travail se fit ainsi jusqu’à ce que les manufacturiers introduisent la machine à coudre dans leurs établissements, c’est à dire en 1879. Ce fut Mr. Ménardier qui posséda la première ».
1er trimestre 1861 – 47 établissements, 864 ouvriers, satisfaisant. L’augmentation est due à un recensement plus approfondi.
2ème trimestre 1861 – 46 établissements, 854 ouvriers. La diminution dans le nombre des établissements est due au mauvais état des affaires d’une fabrique de bonneterie.
4ème trimestre 1861 – 45 établissements, 825 ouvriers, assez satisfaisant. La diminution dans le nombre d’ouvriers (825 au lieu de 838) est attribuée au peu de commandes qui auraient été faites, la température n’ayant point été rigoureuse jusque dans la première quinzaine de ce mois.
1862 – Statistiques industrielles (15M10)
1er trimestre 1862 – 44 établissements en activité : fabriques de bonneterie et de couvre-pieds, filatures de laine, meunerie, 797 ouvriers, état de la fabrication et de la vente satisfaisant. La diminution remarquée dans le nombre des établissements et des ouvriers s’explique par la faillite d’un fabricant de Méréville et par le peu de commandes faites aux autres fabriques de bonneterie de Pussay, la température ayant été douce l’hiver dernier. Les produits des fabricants sont bons et très recherchés. Aucune grève n’est à craindre. Les salaires sont suffisants.
2ème trimestre 1862 – 44 établissements, 623 ouvriers, fabrication et vente difficiles pour la plupart des établissements, à cause de la guerre d’Amérique. Il y a une diminution sensible dans le nombre des ouvriers, elle est annuelle et ne peut donner lieu à inquiétude, les ouvriers trouvant à s’occuper aux travaux de l’agriculture. Les filateurs et fabricants disent que la guerre d’Amérique gène le commerce.
3ème trimestre 1862 – 44 établissements, 625 ouvriers, assez satisfaisant.
4ème trimestre 1862 – 44 établissements, 640 ouvriers, satisfaisant. Le nombre des ouvriers au dernier trimestre n’était que de 625 ; la cause de l’augmentation signalée est due à des commandes plus nombreuses dans les fabriques de bonneterie.
Mars 1862 – La laine se trouve en grande quantité à Etampes, pays voisin de la Beauce. Elle est peu recherchée, l’hiver n’ayant pas été rigoureux. Les prix sont plutôt en baisse qu’en hausse. Les filatures de laine comprennent 1240 broches et ne chôment qu’à l’époque de la moisson. Les ouvriers sont tous de la localité et trouvent à s’occuper aux travaux agricoles pendant le chômage. A Pussay, les fabricants de bonneterie occupent des hommes, des femmes et des enfants au dehors. Les patrons et les ouvriers vivent dans la meilleure intelligence. Les salaires sont suffisamment rémunérateurs. L’hiver doux n’a pas permis une vente bien active. Les magasins s’emplissent.
Avril 1862 – La laine se trouve ici en grande quantité. Elle n’est pas recherchée en ce moment et est encore en baisse. Le nombre de broches est le même, 1240. Les fabricants de Pussay, Saclas, Guillerval, Boissy n’occupent que très peu d’ouvriers, soit au dedans, soit au dehors, leurs magasins étant pleins. Les ouvriers travaillent ailleurs. Les rapports entre patrons et ouvriers sont néanmoins bons. La température élevée de l’année fait craindre que les marchandises ne s’écoulent pas facilement d’ici à longtemps.
Mai 1862 – La guerre d’Amérique, en fermant à l’exportation une partie de ses débouchés, en rendant difficile l’approvisionnement des matières premières nécessaires à plusieurs industries, notamment celle du coton, a apporté dans les affaires une regrettable perturbation dont les effets se feront sentir tant que dureront ces funestes événements. La situation politique de divers états de l’Europe paraît aussi entretenir dans les esprits, ces hésitations, ces incertitudes qui suspendent les transactions et sont si contraires aux relations commerciales. La marche des travaux de construction qui habituellement prend dans le mois de mai un nouvel essor, est restée stationnaire. Un grand nombre d’ouvriers trouvent heureusement de l’occupation dans les exploitations agricoles. Partout du reste les populations supportent la crise actuelle avec une véritable résignation, qu’affermit encore la belle apparence de la récolte prochaine.
Juillet 1862 – Observations générales : la crise commerciale et un hiver peu rigoureux sont les causes de l’état languissant dans lequel se trouve cette industrie. Cependant, ce ralentissement dans la fabrication n’est pas dû entièrement à cette situation. Plusieurs établissements ferment habituellement à cette époque de l’année pour les travaux de la moisson et ne sont rouverts qu’au mois d’octobre.
Septembre 1862 – La question romaine, les guerres d’Amérique et la concurrence anglaise paralysent quelque peu le commerce de nos fabriques et filatures. Le mal toutefois n’est pas inquiétant, attendu que le pays n’est point un centre de fabrication bien considérable.
Octobre 1862 – la guerre d’Amérique, la question romaine, les affaires du Mexique et de la Grèce sont autant de questions qui gênent les opérations commerciales. Cependant, les manufacturiers et fabricants font travailler et les grèves ou chômage sérieux ne sont point à craindre.
1er trimestre 1863 – 44 établissements, 640 ouvriers, satisfaisant.
2ème trimestre 1863 – 44 établissements, 560 ouvriers, satisfaisant. Les ouvriers en laine travaillent en ce moment aux travaux de l’agriculture. De là, la baisse dans le nombre d’ouvriers occupés.
4ème trimestre 1863 – 44 établissements, 605 ouvriers, satisfaisant. Au trimestre dernier, le nombre d’ouvriers n’était que de 509. Il a été pendant ce trimestre de 605, d’où une augmentation de 96 ouvriers. Cette augmentation est également attribuée à une reprise des affaires dans les fabriques de Pussay.
Janvier 1863 – Observations générales : l’industrie des laines n’a pas trouvé par suite de l’élévation à laquelle s’est maintenue la température pendant l’hiver, l’écoulement de ses produits.
Etampes : les industriels de l’arrondissement désirent que les diverses questions politiques soient promptement résolues et que la guerre d’Amérique prenne fin.
Février 1863 – Sur l’ensemble du département, il y a pour la laine 30 filatures, fabriques de châles, bonneterie. Le nombre de broches existantes est de 8030, dont 4975 en activité. Le nombre d’ouvriers ordinairement occupés est de 1500 et actuellement 1265,
dont, pour Etampes, 22 filatures ou fabriques. La matière première est recherchée et les prix sont en hausse, contrairement à 1862. Le nombre de broches existantes est de 1240, dont 920 en activité. Le nombre d’ouvriers ordinairement occupés est de 797 et actuellement 790.
Juillet 1863 – Le nombre d’ouvriers actuellement occupés à Etampes tombent à 100 à cause de la moisson.
Août 1863 – Les ouvriers vont bientôt reprendre le travail des fabriques. C’est à cette époque de l’année que les fabriques de Pussay font leur vente et leurs expéditions.
1864 – Statistiques industrielles (15M11)
1er trimestre 1864 – 44 établissements, 545 ouvriers, satisfaisant. La diminution du nombre d’ouvriers est dû aux travaux agricoles.
2ème trimestre 1864 – 44 établissements, 210 ouvriers, satisfaisant. Point de changement dans le nombre des établissements, mais il y a un fait qui se renouvelle chaque année à l’approche des travaux de la moisson et de la vente des produits fabriqués, c’est le départ de la plupart des ouvriers travaillant dans ces établissements. Le nombre d’ouvriers partis est de 335.
3ème trimestre 1864 – 44 établissements, 499 ouvriers, satisfaisant. 289 ouvriers sont déjà rentrés dans les fabriques. Les autres sont encore occupés aux travaux agricoles.
4ème trimestre 1864 – 44 établissements, 606 ouvriers, satisfaisant. Tous les ouvriers reprennent leurs travaux à la fabrique.
Pendant toute l’année 1864 et 1863, les produits s’écoulent facilement et par suite, les magasins ne sont pas encombrés. Les relations entre patrons et ouvriers sont faciles, les salaires sont suffisamment rémunérateurs. Le travail se fait mécaniquement, dans de grands ateliers et il est aussi disséminé dans la campagne (idem en 1862).
1er trimestre 1865 – 33 établissements, 816 ouvriers, bon. Le nombre des établissements n’a point varié (sic), mais le nombre d’ouvriers a augmenté. L’augmentation est due en grande partie à un recensement des ouvriers occupés dans les campagnes, par les fabriques de bas de Pussay.
2ème trimestre 1865 – 33 établissements, 249 ouvriers, satisfaisant. Le nombre des établissements est le même, mais le nombre d’ouvriers a diminué. Cette réduction se produit tous les ans à l’époque des travaux agricoles et elle n’a dès lors rien d’anormal. les tuileries qui n’occupaient point d’ouvriers au 1er trimestre en ont occupé 18 pendant le 2ème trimestre : il y a donc une augmentation à côté de la diminution dont il vient d’être parlé.
3ème trimestre 1865 – 33 établissements, 833 ouvriers, satisfaisant. Reprise des travaux des fabriques après les moissons.
4ème trimestre 1865 – 33 établissements, 816 ouvriers, satisfaisant. La diminution est due au chômage des tuileries pendant la saison d’hiver.
1866 – L’annuaire de Seine-et-Oise cite 14 fabriques de chaussons à Pussay :
Boyard et Brinon ; Buret-Deniset et Langlois-Marcille ; Buret L. ; Buret Fils aîné et A. Buret ; Dujoncquoy (Alexandre) et Fils ; Gry-Forteau ; Huteau ; Lejeune-Buffetault ; Lejeune-Imbault ; Lemaire aîné ; Lemaire-Boulé ; Lubin Frères ; Peltier ; Savouré.
1866 – Statistiques industrielles (15M12)
1er trimestre 1866 – 33 fabriques de bonneterie et de couvre-pieds, meunerie, filatures de laine, tuileries, 825 ouvriers, satisfaisant. Pas de changement dans le nombre des établissements. Il y a 9 ouvriers en plus, lesquels sont occupés dans les tuileries qui reprennent leurs travaux annuels.
3ème trimestre 1866 – Boissy : 1 filature de laine ; Guillerval : 1 filature de laine avec teinturerie ; Pussay : 12 fabriques de chaussons de laine ; Saclas : 2 filatures de laine.
Juin 1866 – A Guillerval, la matière première est fournie par les fabricants de Pussay.
1er trimestre 1867 – les filatures de Guillerval et Saclas ne travaillent qu’à façon pour les marchands de bas de Pussay, (idem en 1869). Mauvaises récoltes, exportation en Angleterre.
1875 – Visite des établissements le 5 novembre
dans le cadre de l’enquête menée sur le travail des enfants (16M20 à 24).
A cette date , trois établissements ont pris une importance prépondérante :
Mme Veuve Boyard et Brinon : 75 ouvriers dont 6 enfants
MM Dujoncquoy-Jaquemet-Bigot : 65 ouvriers dont 16 enfants
MM Langlois-Marcille : 20 ouvriers dont 1 enfant
Les autres fabriques sont de moindre importance :
Lubin : 1 ouvrier, pas d’enfant
Buret-Ballot : 4 ouvriers, pas d’enfant
Lejeune-Buffetault : 3 ouvriers dont 1 enfant de 9 ans qui suit régulièrement l’école ; il travaille environ 3 heures avec son père pour n’être pas livré à lui-même pendant la récréation
Hutteau : 6 ouvriers, pas d’enfant
Peltier : 6 ouvriers, pas d’enfant
Mme Veuve Buret-Belzacq : ?
Gry : 11 ouvriers, pas d’enfant
Lemaire : 14 ouvriers dont 2 enfants
Lejeune : 3 ouvriers, pas d’enfant.
En hiver le travail a lieu de 7h12 du matin à 9h du soir, en été de 5h du matin à 7h du soir. Il est divisé par 2 repos. Les ateliers sont fermés le dimanche et les jours de fête reconnus.
Le registre et les livrets prescrits, constatant que les enfants ont suivi l’école pendant plusieurs années, existent et la loi est affichée.
Le nombre d’ouvriers mentionnés tient compte de ceux qui travaillent à l’intérieur de l’établissement et ne comprend pas ceux du dehors qui ont un métier à domicile.
1876 – Enquête sur le travail des enfants – 11 fabriques de bonneterie drapée, dont 2 principales :
MM Dujoncquoy-Jaquemet-Bigot : 90 ouvriers dont 20 enfants (12 garçons et 8 filles de plus de 12 ans et ayant suivi l’école pendant un temps suffisamment long).
MM Brinon et Boyard Fils : 90 ouvriers dont 18 enfants (10 garçons et 3 filles de 12 à 16 ans et 5 filles de 16 à 21 ans, quelques-uns continuent à suivre les cours d’adultes).
MM Marcille-Langlois : 20 ouvriers dont 2 filles de 14 et 16 ans
Mme Veuve Louis Buret : 22 ouvriers dont 4 enfants de 12 à 17 ans
MM Gry-Boyard : 12 ouvriers dont 1 fille de 14 ans
MM Lemaire-Sevestre : 16 ouvriers dont 1 fille de 15 ans
M Huteau
MM Lejeune-Buffetault
MM Buret-Ballot
MM Lejeune-Imbault
MM Peltier-Vassort
Ces 5 dernières fabriques n’employaient pas d’enfant. Dans aucune de ces fabriques, on ne travaille la nuit.
1870-1880 – Synthèse des observations
la vente des produits finis s’ouvre ordinairement en juin et se continue jusqu’en novembre. Elle devient moins active et parfois même se termine en décembre. L’ouverture en juin 1875 donne lieu à ce commentaire : « L’ouverture de la vente présente une activité plus grande qu’en 1874 ». L’année 1874 semble avoir été une très mauvaise année pour la vente, les deux hivers précédents ayant été doux. Les magasins restent encombrés de janvier à août et les produits s’écoulent difficilement par défaut de commandes. Ce n’est qu’à partir du mois d’octobre que la vente se remet.
En décembre 1877 on note : « La vente est terminée. La plupart des maisons ont vendu tous leurs produits. Il se trouve des stocks importants [de matière première sans doute, voir plus bas] fabriqués en prévision de la prochaine campagne ». Cette année-là, en 1877, on note dès l’ouverture en juin : « La vente est peu active. On a lieu de penser que l’hiver n’ayant pas été rigoureux, la vente sera cette année moins forte que l’an passé » et en septembre : « Les produits s’écoulent moins facilement que d’ordinaire ». Il y a ainsi de bonnes et de moins bonnes années, selon les rigueurs ou les douceurs du climat.
Les hauts et les bas qui affectent ainsi les ventes se répercutent d’une part sur l’achat de la matière première, la laine, d’autre part sur le travail des ouvriers. La laine est généralement achetée vers les mois de mai et juin et son prix monte ou baisse en fonction d etout un ensemble de facteurs extérieurs à savoir :
– si elle est rare, comme en 1875, en mars, avril, mai où les prix grimpent pour redescendre en juin, juillet sous l’influence des laines étrangères, de Londres sans doute : le phénomène se reproduisant l’année suivante, le commentaire précise : « influence des ventes de Londres ».
– si le stock est important,
– si les hivers précédents ont été doux et que de ce fait, les ventes n’ont pas eu lieu, tel en juin 1877, où on note : « Les achats sont à peine commencés. On se décide difficilement à traiter quelques affaires », les prix restent stationnaires.
Il arrive ainsi qu’un cultivateur ne puisse écouler sa laine ou la vendre un bon prix. A l’inverse, il y a aussi pour lui de bonnes années.
Il en va de même pour l’ouvrier. Les hivers 1872 et 1873 ayant été doux, les ventes en 1873 et 1874 sont difficiles et si la situation du travail ne souffre pas trop en 1873, il n’en est pas de même en 1874. Dès janvier, les heures de travail sont réduites de plus de la moitié. Une situation analogue se reproduit en septembre 1877. L’hiver 1876 n’ayant pas été rigoureux et celui de 1877 s’annonçant doux, il y a réduction de quart de journée et des chômages partiels atténués par les travaux de la culture. Le travail sera ensuite « ralenti » ou « languissant », mais sans chômage, jusqu’en septembre 1878 où il redeviendra « actif » alors que les produits s’écouleront facilement.
La vocation agricole de Pussay atténue en partie les aléas du climat et ses répercussions sur la fabrication des chaussons. Les ouvriers travaillent dès février en prévision de la prochaine campagne et à partir de juin, certains d’entre eux quittent momentanément leur atelier pour faire la moisson. Il ne reste alors dans les établissements que les commis et les hommes payés à l’année.
Le travail s’exécute à la fois mécaniquement et à la main dans les ateliers de chaque fabricant, mais il est aussi disséminé dans la campagne environnante. Quant au travail du tricot et de couture exécuté par les ouvrières dans la commune, il est entièrement fait à la main.
A partir de février 1878, on trouve cette observation : « 9/10 du travail se fait mécaniquement, 1/10 se fait à la main ». Elle ne vaut que pour le travail en atelier, puisqu’en janvier, la notation précédente sur le travail à domicile avait été reprise.
Pendant toute cette période d’après-guerre, de 1870 à 1880, le nombre des ouvriers fixes en atelier n’a cessé d’augmenter, passant d’environ 300 à 400. Les relations entre patrons et ouvriers sont « bonnes » ou « faciles ». En septembre 1877, une des années où les journées sont réduites et où il y a du chômage, elles restent « faciles grâce aux concessions des patrons », mais le rapport ne dit pas de quelle nature sont ces concessions.
Quant aux salaires des ouvriers, ils sont le plus souvent « suffisamment rémunérateurs », qualification à laquelle il est parfois ajouté « travail à la tâche » (juillet 1872) ou « ils ne tendent ni à augmenter, ni à diminuer ». En janvier 1876, on note qu’ils sont « en rapport avec ceux de la contrée ». De juin 1877 à juin 1878, ils tendent à la hausse, de même que de septembre 1879 à décembre 1880. Au cours de cette dernière année, les salaires minimum et maximum sont de 3,00 F à 4,00 F la journée pour les hommes, de 1,50 F à 2,00 F pour les femmes et de 1,50 F à 2,50 F pour les enfants.
Les trois filatures de Guillerval et de Saclas continuent pendant toute cette période à travailler à façon pour les établissements de Pussay et exclusivement pour eux. Dans ces derniers, le travail consiste seulement à tisser la laine filée à Guillerval et Saclas.
3 janvier 1880 – Création d’une société entre MM
Adolphe Georges Brinon
Charles Louis Emile Boyard
pour la fabrication et le commerce de bonneterie de laine, sous la raison sociale « Vve Boyard Fils et A. Brinon », au capital de 120.000 F, fourni par moitié par les deux associés. M. Brinon se réservait le droit de s’adjoindre son gendre Georges François Gry.
1881 – Enquête sur le travail des enfants – toujours 11 fabriques de bonneterie drapée, mais l’une d’entre elle prend un net ascendant.
MM Boyard Fils et Brinon emploient alors 150 ouvriers dont 26 enfants, soit 60 ouvriers de plus qu’en 1876.
MM Dujoncquoy-Jaquemet-Bigot n’emploient plus que 55 ouvriers dont 8 enfants, soit 35 ouvriers de moins qu’en 1876.
L’instituteur Ernest Maisse, nous signale dans sa monographie, le transfert de cet établissement en 1881 à Sainte-Mesme près de Dourdan. Le mémoire établi par Messieurs Dujoncquoy en 1867 (voir annexe à la fabrique Dujoncquoy) mentionne bien la création d’une filature à Ville-Lebrun en 1834. 50 ans plus tard, se regroupent-ils sur Dourdan pour des raisons économiques, une concurrence accrue ou une autre raison ? La réponse manque à cette question.
Restent les autres fabriques :
Mme Vve Louis Buret : 23 ouvriers dont 2 enfants
MM Lemaire-Sevestre : 16 ouvriers dont 1 enfant
M Ménardier (successeur de M Huteau) : 15 ouvriers dont 2 enfants
MM Peltier-Vassor : 5 ouvriers dont 1 enfant
M Charles Langlois : ? ouvriers dont 3 enfants
MM Gry-Boyard : ? ouvriers dont 6 enfants
Les inspecteurs avaient noté en observations « Les ateliers de Pussay sont généralement en règle. On n’y travaille d’ailleurs ni la nuit, ni les dimanches. Les chiffres ci-dessus sont ceux qui existaient lors de la visite faite par le soussigné au commencement de juillet ; la moisson les réduira pendant quelques mois. Du reste, la situation de l’industrie de Pussay est généralement amoindrie ; ainsi une fabrique qui faisait marcher 42 métiers en a supprimé 13. Nous n’avons pas porté sur notre état les fabriques qui n’emploient pas d’enfants ou de filles mineures ; ce sont celles de MM Lejeune-Buffetault, Buret-Ballot et Lejeune-Imbault ». Il faut dire que l’hiver 1880 avait été très doux et que de ce fait, la demande de chaussons ayant fortement diminuée, la production s’en était ressentie.
1882 – Souscription pour la bannière des bonnetiers de Pussay
1er janvier 1883 – Création de la société A. Brinon et Georges Gry
le 1er janvier 1883, la société créée en 1880 entre Adolphe Brinon et Charles Boyard est dissoute, ce dernier s’étant installé fabricant de bas et de couvertures à Orléans. A la même date, est créée pour 18 ans, la société A. Brinon et Georges Gry, au capital de 120.000 F, le siège social étant celui de la maison Vve Boyard fils et A. Brinon. Elle était constituée par l’association de deux établissements :
– celui de MM Brinon et Charles Louis Emile Boyard sous la raison sociale « Veuve Boyard fils et A. Brinon »,
– et celui de Mme Rose Virginie Irma Belzacq, épouse de M. Brinon, sous la raison sociale « Veuve Louis Buret ». (Archives Départementales de l’Essonne, ADE, actes des sociétés).
M. Brinon se réserve le droit de faire entrer quand bon lui semble, dans la société, ses deux fils Gustave et Henri. Adolphe Brinon avait épousé en 1855, Mlle Thérèse Louise Bathilde Boyard, fille de Mme Veuve Boyard. Après sa mort en 1864, il épousa Mme Rose Belzacq, elle-même veuve de Louis Buret.
28 mars 1886 – Adhèrent à la société A. Brinon et Georges Gry :
Adolphe Georges Brinon
Georges François Gry
Gustave Henri François Brinon
Charles Henri Brinon
Sous la raison sociale « A. Brinon, ses fils et Georges Gry ».
1888 – Statistique sommaire des industries principales (15M22)
Il y a à Pussay 8 établissements de tissage. Il est précisé en marge le nota « A Pussay on tisse, on ne file pas ».
Nombre moyen des ouvriers employés : hommes : 200 ; femmes : 100 ; enfants : 75
Force en chevaux des moteurs (à vapeur) : 50
Nombre des métiers à tisser (actifs) : 22 (il n’y a pas de métiers inactifs)
Tissage à bras (nombre approximatif des métiers à tisser à bras en activité) : 80
1894 – Statistiques industrielles (15M19) 2ème semestre
– Fabriques de chaussons drapés :
Le nombre des établissements en activité n’augmente ni ne diminue. L’outillage ne subit pas de transformation importante. La production et la vente vont subir un certain ralentissement, en raison de la douceur des premiers mois d’hiver. Les prix de vente sont en baisse de 12 à 13 %, par suite de la concurrence étrangère, plutôt désavantageuse.
Les salaires restent les mêmes et n’ont aucune tendance à se relever, malgré leur modicité : 2,00 F à 2,50 F au lieu de 4,00 F à 5,00 F, ce qu’ils étaient il y a quelques années. Il y a plutôt afflux de main d’œuvre. Il n’y a pas eu de chômage proprement dit, mais seulement ralentissement dans la fabrication. La durée du travail journalier, par suite du ralentissement dans la fabrication, a subi une certaine diminution.
Cette industrie comporte 3 établissements qui sont tous situés dans la commune de Pussay. L’établissement le plus important a une teinturerie sur la commune de Chalou-Moulineux qui n’occupe que quelques ouvriers.
– Filatures de laine :
Le nombre d’établissements est stationnaire. La production et la vente sont plutôt faibles, l’une des deux filatures suivant la hausse ou la baisse des fabriques de chaussons de Pussay, pour lesquelles elle travaille exclusivement. Elles ne travaillent qu’à façon et ne font aucune opération commerciale. Il y a tendance à afflux de main d’œuvre. Ces filatures sont situées à Saclas et à Guillerval.
1900 – Transformation et concentration de la fabrication
« A ce jour [22 septembre 1899, écrit l’instituteur Ernest Maisse dans sa monographie] la fabrication est complètement transformée sous tous les rapports ; elle est essentiellement mécanique. Tous les métiers et toutes les machines-outils sont mus par la vapeur et accomplissent le travail de plus de 10.000 ouvriers et ouvrières.
La fabrication est concentrée dans quatre fabriques importantes dirigées par
MM Brinon, ses fils et Georges Gry
M Lemaire
M Boucart
M Buret
qui emploient dans leur ateliers 1200 individus avec autant au dehors. La force motrice est produite par quatre appareils d’une force totale de 230 chevaux-vapeur.
Les produits fabriqués consistent en chaussons de laine feutre sans semelle ou avec semelle de cuir ou de corde, de formes et de modèles très variés ; on y fabrique aussi les pantoufles, les souliers et les bottines de cuir.
Tous ces articles sont expédiés sur tous les points de la France et même en Belgique et en Angleterre ».
1901 – Le 23 mars, les quatre associés de la société A. Brinon, ses fils et Georges Gry passent un acte pour continuation de l’association formée entre eux pour la fabrication de bonneterie et de chaussures et le commerce y relatif, et ce pour une durée de 18 ans à partir du 1er janvier 1901. Sous l’article 14, il est convenu que le 31 octobre 1913, Georges Gry se retirerait de la société et sous l’article 15, qu’Adolphe Brinon se retirerait quand bon lui semblerait. (Archives Départementales de l’Essonne, Actes des sociétés)
1904 – Le 29 mai, il est reconnu que M Brinon père et Georges Gry se sont retirés de la société depuis le 31 décembre 1903, que Gustave Henri François Brinon et Charles Henri Brinon continueront seuls la société, qui s’appellera désormais
« Les fils de A. Brinon ».
1913 – Le 1er mars, la société « Les fils de A. Brinon », créée en 1904 et exploitée par Gustave et Henri Brinon est purement et simplement dissoute. Henri Brinon sera seul liquidateur.
1914 – Le 1er mars,
François Jean Marie Brinon,
Etienne Paul Brinon
Paul Henri Brinon
Industriels à Pussay, constituent un établissement industriel et commercial pour la fabrication et la vente de la bonneterie, des chaussures, feutres, tricots, flanelles et de toutes matières textiles
« Les fils de Gustave Brinon ».
1923 – Le 12 juillet, Charles Henri Brinon, industriel, crée une société anonyme « Société des établissements A Brinon Fils » pour la fabrication et le commerce de la bonneterie drapée et des chaussures et la filature et le tissage de toutes matières premières, pour une durée de 99 ans à partir du 1er janvier 1923. Henri Brinon apporte l’établissement de Pussay (l’usine, 1,5 hectare de terre dans le parc, la propriété Boulanger et la propriété Chaudé, etc.) et les ateliers de Guillerval et Angerville : valeur 3.000.000 F.
1930 – Enquête menée par la chambre de commerce sur la crise de l’industrie lainière (14M3)
Lors de la séance de la chambre des députés du 29 décembre 1929, le président du conseil, ministre de l’intérieur, André Tardieu, avait promis d’étudier l’incidence de l’impôt sur le chiffre d’affaires, en ce qui concerne l’industrie lainière, et vu le manque de renseignement numériques précis, procède à une enquête générale (lettre du 14 janvier 1930) :
« Vous n’ignorez pas que des groupements industriels d’une importance considérable, des intérêts commerciaux contraires s’opposent avec force. Le gouvernement n’a pas à prendre parti dans ce débat qui doit demeurer strictement corporatif. Toutefois l’industrie lainière constitue un élément essentiel de notre économie nationale ; les produits qu’elle fabrique tiennent une large place dans nos échanges internationaux. Aussi le gouvernement va-t-il chercher d’une part à déterminer la portée exacte des arguments présentés par les différents groupes, d’autre part à apprécier dans quelle mesure l’intérêt général du pays, au double point de vue économique et budgétaire, pourrait éventuellement commander une réforme partielle de l’impôt.
L’enquête aura donc pour but de déterminer la situation actuelle de l’industrie lainière en France :
– l’importance relative des groupements en présence, compte tenu du nombre et de la nature exacte des transformations industrielles effectuées par chacun d’eux ;
– l’incidence de la taxe sur le chiffre d’affaires, en classant les industriels d’après la nature des opérations réalisées ;
– la part prise par chaque catégorie d’industriels dans les exportations de produits lainiers…
Vous insisterez vivement auprès des représentants des divers groupes, pour que les réponses vous soient adressées avec le maximum de précision et de célérité. Vous leur montrerez que toute abstention affaiblirait ipso facto la thèse à laquelle ils se rangent et que leur intérêt particulier comme l’intérêt général exige de leur part le concours le plus actif et le plus entier.
Au cours de cette enquête, vous affirmerez la volonté du gouvernement d’adopter vis à vis du problème posé par l’industrie lainière, la même politique de compréhension et d’action dont il a témoigné, et par le vote de la loi portant dégrèvement d’impôts, et par celui des lois relatives aux produits essentiels de notre terre : blé, sucre, betterave et vin. Mais vous laisserez entendre que s’il est éloigné de toute conception étroite des nécessités administratives, sa préoccupation fondamentale reste d’éviter toute réforme qui, soit directement, soit par ses répercussions, risquerait de compromettre la taxe sur le chiffre d’affaires et par là-même l’équilibre du budget ».
Le relevé des industries lainières concernées par l’enquête est envoyé le 25 janvier 1930 au Préfet. Y figurent :
– la société des établissements A. Brinon Fils – Manufacture de chaussons – Pussay
– la société anonyme des filatures de Saclas (Ets Gaillard) – Filature de laine cardée – Saclas.
Les réponses donnent le résultat suivant :
A. Brinon Fils, bonneterie, rue du midi, Pussay : 540 ouvriers, salaires : 3.710.000,00 F, non classé
Les fils de Gustave Brinon, manufacture de pantoufles, route de Gommerville, Pussay : 80 ouvriers, salaires : 673.775,00 F, classé C.A.R.
Société anonyme des ?, 48 ouvriers, salaires : 368.504,45 F, classé C.A.R.
Sur l’ensemble des réponses du département, il y eut :
– 6 établissements qui se déclarèrent C.A.R., employant 229 ouvriers et payant des salaires pour un montant de 1.594.259,35 F
– 1 établissement qui se déclara C.D.I., employant 3 ouvriers et payant des salaires pour un montant de 12.600,00F
– 8 établissements qui se déclarèrent « Non classé », employant 606 ouvriers et payant des salaires pour un montant de 4.312.733,95 F, dont les établissements A. Brinon Fils.
C.A.R. : firmes affiliées au Comité d’Action pour le Rétablissement de l’égalité fiscale dans l’industrie lainière
C.D.I. : firmes affiliées au Comité de Défense des Industries lainières contre la modification de la taxe sur le chiffre d’affaires.
Le montant des versements effectués au titre de la taxe sur le chiffre d’affaires fut de :
– 260.000,00 F pour A. Brinon Fils, sur la vente de tissus, feutres, bonneterie de laine, divers
– 50.300,00 F pour Les fils de Gustave Brinon, sur la même vente
– 90.601,65 F pour les filatures de Saclas, sur la vente de fils
Le nombre des tissages et fabriques de bonneterie est passé de 3 au 1er janvier 1914 à 9 au 31 décembre 1929, soit une augmentation de 200 %, le nombre des ouvriers de ces firmes est passé sur la même période de 450 à772, soit une augmentation de 7100 %.
Le nombre de filatures, tissage de laine et filatures de bonneterie de laine était à 1 au 1er janvier 1914 et est resté identique au 31 décembre 1929, le nombre d’ouvriers étant passé de 30 à 48.
Il n’y a aucun peignage dans le département de Seine-et-Oise.
Commentaires :
Vallivéro-Savouré le 26 janvier 2012
Ces derniers jours, en faisant mes recherches généalogiques, j’étais atterrée de constater un nombre important de jeunes femmes décédées après leur accouchement et par la mort de nouveaux-nés et d’enfants avant 10ans. Que ce soit dans ma branche, ou dans une autre ; à présent, à la lecture de ce mémoire, je comprends que leur vie a dû être pénible. Bien sûr, je sais qu’au début du XXième siècle ce ne fut pas mieux dans les usines.
Administrateur le 28 janvier 2012
Bonjour,
Nous vous remercions d’avoir pris le temps de lire notre site et de nous laisser un commentaire. Il est vrai qu’on est toujours surpris de constater la mortalité tant infantile que maternelle au cours des siècles précédents. Se replonger dans le passé permet de prendre conscience des immenses progrès qui ont été réalisés au cours des 19ème et 20ème siècles. Dans la mesure où vous avez laissé votre commentaire à l’article « travail de la laine », nous nous demandons si vous avez lu celui sur les médecins, dans le chapitre vie quotidienne, qui donne beaucoup plus de détails sur ce problème (maladies, épidémies, médecins, sages-femmes et bien sûr mortalité).
Si vos ancêtres ont vécu à Pussay et que vous ayez des documents sur le village, n’hésitez pas à nous en faire part.
Cordialement
Ma branche la plus proche est venue s’installer à Pussay vers 1850. Ils venaient de Grandville tout proche, berceau de mes origines. Je n’ai pas connu mon grand père décédé assez jeune et qui s’occupait d’un café-restaurant à PARIS. Je n’ai malheureusement aucun document sur PUSSAY, et c’est d’ailleurs pour ces raisons que j’ai voulu approfondir mes recherches généalogiques.
Bonjour,
Nous sommes vraiment ravis que notre « travail » puisse vous intéresser et vous aider à retrouver vos racines, car le but de notre site est bien de faire revivre la vie de tous ces hommes et femmes inconnus qui ont pourtant participé à notre histoire. Dites-nous quel était le prénom de votre ancêtre venu s’installer en 1850 à Pussay, car il y a sur Pussay beaucoup de Savouré.
Encore une fois merci pour l’intérêt porté à notre site
Cordialement
Anne-Marie et Jean-Luc Firon